Le socle d'une éolienne de taille moyenne consomme 500 mètres cubes de béton, et 40 tonnes d'acier soit au bas mot 800 tonnes. Sans parler du mât et des pales... cc/Flickr/steve.grosbois
Par Ludovic Grangeon, partenaire fondateur de "Parménide"
- jeudi 15 novembre 2012 - Economie matin.fr
Cette tentative de planification improvisée au niveau européen, déjà si délicate au niveau national, tourne à l’absurde. Il fallait trouver un gadget répondant à l’effet de mode, qui permette aux politiques des deux camps d’avoir la paix avec quelques milieux se servant de l’écologie pour faire de la politique. D’une part, la technologie éolienne des grandes hélices tripales est hasardeuse, polluante et obsolète. D’autre part, elle est lancée à grande échelle comme si on décidait d’un coup de construire des autoroutes pour un seul modèle de voiture qui n’aurait même pas été testé.
Seuls quelques conseillers ou experts ont décidé du lancement de ces projets (comment ? avec qui ? ). Le pouvoir politique a prononcé quelques avis mineurs sur le « comment ». Encore a-t-on guidé sa plume, et même parfois discrètement consenti quelques générosités connexes. Quelques banquiers d’affaires avisés ont sans doute accordé leur inventivité et leur alchimie à des systèmes de trading financier qui contribuent un peu plus à la spéculation mondiale actuelle, notamment dans les couloirs de la Conférence sur le Climat de Copenhague en 2009, qui n’a pas été un échec pour tout le monde.
Bien plus, l’introduction improvisée de ces techniques s’est faite sans préparation des réseaux de transport d’électricité qui n’étaient pas prévus pour ce type de distribution. Des investissements considérables, également supportés par les consommateurs particuliers ou entreprises, vont s’avérer nécessaires pour renforcer les réseaux et renchérir encore ces augmentations déjà insupportables (dispositif TURPE) pour 3 à 5 euros supplémentaires au Mégawatt/heure, hors facture énergies renouvelables. Les pertes d’électricité produite pour rejoindre le réseau atteignent jusqu’à 20% en ligne alors qu’elles pourraient être consommées sur place. Plus on choisit des sites isolés pour abuser quelques maires ruraux ou rencontrer des contestations isolées et démunies, plus on augmente les pertes de réseau.
Dernier point, comme l’électricité n’est pas stockable, ces solutions « d’énergie renouvelable » amènent à payer au plus cher l’électricité qui a le moins de valeur, produite de façon aléatoire, et sans rapport avec les périodes de besoin critique du réseau. Ceci est vérifié tant en France que dans les autres pays européens, notamment Allemagne, Espagne, etc… Certaines compagnies américaines achètent de l’électricité éolienne pour bénéficier des certificats, et ne l’injectent même pas dans leur distribution, car cela leur coûterait trop cher.
Les erreurs s’accumulent au grotesque : Filière artificielle, alibi facile, bilan désastreux : subventions publiques massives pour fortunes privées rapides, procédé technique hasardeux, rendement électrique ridicule à moins de 2.5% de la production nationale, accidents étouffés, spéculation effrénée, optimisation financière et fiscale massive, trafics de commissions internationales, opacité des reventes massives de certificats qui permettent à de gros pollueurs de continuer leur activité : on hésite entre Madoff, ententes, corruption, manipulations, et clientélisme à grande échelle. C’est l’exemple même de ce qu’une chercheuse comme Maya Beauvallet qualifie de « stratégie absurde » ou de la théorie du « passager clandestin ».
De nombreux aspects gênants pour l’image sont passés sous silence. Chaque éolienne nécessite un socle de béton jusqu’à 20 m de profondeur, représentant de 800 à 2000 tonnes de béton ferraillé, qui ne sera jamais enlevé, engendrant à terme une pollution du sous-sol. Cet aspect est soigneusement éludé dans les compromis de location de terrains dont les propriétaires découvriront la mauvaise surprise à terme. Au démantèlement, seul un décapage de surface est prévu. La profession a activement participé à la rédaction du décret d’application, mais ce point semble avoir échappé à l’attention des rédacteurs.
Les alternateurs de plusieurs centaines de kilos sont dopés aux lanthanides, les terres rares, matériaux de haute toxicité sur lequel l’Académie de Médecine réalise actuellement une étude approfondie en vue d’actualiser le texte de l’Institut de prévention des risques sanitaires. Ce point n’est mentionné nulle part dans les enquêtes publiques. L’extraction et le raffinage de ce matériau provoquent d’énormes pollutions locales mais aussi des risques à termes analogues à ceux des métaux lourds ou de l’amiante dans les installations éoliennes. Les fabricants d’aimants à terres rares soulignent le grave danger de dégradation rapide de ce matériau selon la température d’utilisation. La température d’un alternateur d’éolienne atteint fréquemment 300 degrés. La pollution peut dans ce cas être progressivement diffusée par les éoliennes jusqu’à 50 kilomètres de rayon.
Les bruits propagés par les éoliennes se manifestent sous forme de basses fréquences, de battements et de turbulences jusqu’à 15 km. Le récent congrès mondial de l’INCE a porté sur les bruits des éoliennes avec 89 communications scientifiques de tous ordres. Une étude australienne a démontré la dangerosité de ces engins pour la circulation aérienne. On imagine la suite en cas de développement off shore…
A la suite de l’action d’une association contre un dispositif tarifaire avantageux mais non réglementaire, les financements sont devenus plus difficiles. Comme dans toute bulle financière, les acteurs ont commencé à être plus vigilants. Les faiblesses du système apparaissent. Les affirmations enjolivées, les mythes, les objectifs enthousiastes se révèlent dans toute leur réalité beaucoup moins sonnante et trébuchante.
Sur place, les associations de défense n’ont pas manqué de mettre à jour les préjudices énormes du développement durable : baisse de fréquentation touristique, perturbation des exploitations agricoles, affections dues au bruit, dépréciation considérable du parc immobilier, recettes fiscales ridicules, quantités infimes et aléatoires d’électricité réellement produite, dérogations soudaines et exorbitantes au droit de l’urbanisme… etc… Un simple aspect : depuis quelques années, la jurisprudence a toujours confirmé la dépréciation des biens immobiliers situés à la vue d’éoliennes, de 22 à 40 %. Sachant qu’une éolienne concerne en moyenne de 700 à 1200 habitations, on imagine l’ampleur du préjudice local…
Tous ces événements convergent vers le printemps 2013 où devraient se dénouer beaucoup de situations reportées ou dissimulées depuis l’année dernière. Après avoir atteint à peine 1/3 de ses objectifs en 2012, l’éolien risque de connaître une sévère épreuve de vérité en 2013. Ce serait sans doute un facteur positif pour les véritables énergies renouvelables dont le développement a été gêné par cette spéculation effrénée.